Lors de mes voyages, j’ai pris l’habitude de prendre le plus petit détail et d’en faire un sujet de discussion décalé. Sans me prendre au sérieux, et en faisant ressentir cette malice à mes lecteurs. Belfort la fière ma accueilli, mais m’a rendu humble, respectueux et admiratif. Cette cité de l’est de la France a un passé qui force évidemment le respect, et elle met un point d’honneur à transmettre cet héritage, noblement. Aussi, ces deux heures passées à flâner à Belfort seront un authentique hommage de mémoire à tous ces soldats morts pour la France.
Le passé de Belfort par delà les murs
Arrivée dans la cité de Belfort, enfin me voilà pied à terre devant le Square du Souvenir, début de mon pèlerinage. Cet ancien champ de foire, qui accueille depuis 1924 le Monument aux Morts de la Grande Guerre, est aménagé de 1925 à 1927, en un plaisant square admirablement fleuri et accueillant. De la vie, du mouvement, ce jardin semble être un carrefour pour les Belfortains d’hier mais aussi d’aujourd’hui. Le Poilu, bronze de 2,10 mètres, en assure la garde paisible et symbolique.
Je comprends donc très vite la dimension symbolique de l’endroit, et la force des Belfortains à entretenir l’image de reine de conquête que leur cité à durement gagné au fil des siècles. Ensuite, je tends l’oreille et perçois le léger bruit de l’eau… La Savoureuse. Prenant sa source au Ballon d’Alsace, majestueux mont dominant le couloir de Belfort, elle berce la ville de ses caprices.
Le Chemin du souvenir
La vue du pont Carnot est magnifique. Ce pont est à mon sens le symbole parfait pour donner une identité à la cité de Belfort. Ainsi dans le sens nord/sud, il surplombe la savoureuse avec au nord la source de la tranquille, et au sud son dernier élan pour rejoindre l’Allan. Le pont croise cette rivière, ce segment de vie, ce long fleuve tranquille. Et dans le sens est/ouest, le pont sert de passerelle intemporelle à l’histoire. Avec à l’est la vieille ville, les ruelles historiques et bien entendu la citadelle Vauban. Et à l’ouest de ce pont la nouvelle ville, la nouvelle vie, les artères commerçantes, le mouvement et la joie. C’est donc le lien indéfectible entre les époques, ce lien qui a forgé le cœur de la ville.
Et c’est depuis ce pont Carnot que je pénètre dans la vieille ville. Quelques pas sur le boulevard du même nom, et me voilà sur une des places emblématiques de Belfort: La place de la République. Centre administratif névralgique de la cité, elle regroupe la préfecture, le tribunal d’instance et exhibe fièrement en son centre un des plus beaux monuments de la ville. Je suis en effet tombé sous le charme de cette représentation pleine de fierté et de sens.
Le monument des Trois Sièges de Belfort est un monument commémoratif de 1913, de l’histoire du Territoire de Belfort et de l’histoire de France, du sculpteur alsacien Auguste Bartholdi. Situé au centre de la place de la République, du centre historique de Belfort, il commémore la création du Territoire de Belfort en 1871, et la résistance héroïque de trois chefs militaires de l’armée française, et de leurs bataillons, qui ont résisté aux sièges des trois invasions de la France par la trouée de Belfort, du XIXe siècle : Pierre Philippe Denfert-Rochereau (1823-1878) durant le Siège de Belfort de la guerre franco-allemande de 1870, Claude Jacques Lecourbe (1759-1815) en 1815 durant les Cent-Jours du Premier Empire de l’empereur Napoléon Ier, et Jean Legrand (1759-1824) en 1813, lors de la Retraite de Russie de la Grande Armée du Premier Empire.
L’apogée au bout du fusil
Laissant derrière moi cette place de la République, je m’engouffre par la rue de la Porte de France pour atteindre la Place d’Armes. Elle se place au centre de nombreuses petites ruelles qui desservent les recoins de la vieille ville. Son kiosque et la cathédrale Saint-Christophe la rendent apaisante, assise au pied de la forteresse imprenable qu’est la citadelle Vauban. Je regarde le ciel, je tends les bras et je tourne en rond, laissant l’atmosphère me transporter à l’époque où la vie y était douce, bercée de musique.
Mais le temps presse. Je dois continuer mon périple car la haut, tout en haut, m’attend le majestueux gardien de la cité. Rue du Général Roussel, Grande rue et me voilà à gravir cette route, longeant les remparts, comme un évadé fuyant la colère. Je marche, et le soleil de juillet me nargue, lui qui est déjà la-haut. Il sait que j’attends beaucoup de cet effort, et sait aussi s’il sera récompensé. Peut-être le gardien ne sera t’il pas au rendez-vous? Peut-être ne suis-je pas assez méritant pour m’incliner devant sa superbe? Et s’il était là… Que me dira t’il? Les murs abruptes de la citadelle déroulent leur omniprésence devant mes yeux ébahis.
Il est là: Le Lion, fier et fort, calme et puissant. Le Lion de Belfort est l’œuvre du sculpteur alsacien Auguste Bartholdi. Après 5 années de travail, il trôna enfin au pied de la citadelle, en hommage au siège de 1870. Il tourne ainsi le dos à l’est, à l’Alsace perdue lors de cette bataille et à l’Allemagne, ennemi d’Antan. Quel joie pour moi de la voir se dresser devant moi. Comme l’apogée d’une quête historique qui ne fait que commencer. Car Belfort abrite un patrimoine historique tel que ces deux heures n’auront pas suffit à en faire le tour. Mais quel appel au souvenir, à l’humilité et au respect! Que d’hommes et de femmes fièrement dressés contre l’ennemi! Et c’est le gardien de la cité qui me glissera ces quelques mots, en guise d’adieu: «Comtois, rends-toi! Nenni, ma foi»
Crédits Photos : Photos personnelles Le Druide