La fin de ces réunions publiques marquées, aujourd’hui, par la remise du compte rendu de la CPDP (Commission Particulière du Débat Public) aux promoteurs, me laisse un goût amer. Ces 4 mois de débat m’ont montré que ce projet cristallisait de nombreux problèmes de société. Comme l’imposition forcée d’un modèle mondialisé d’énergie sur les territoires. Sans que les habitants n’aient leur mot à dire. Comme des questionnements sur notre démocratie mise à mal par nos dirigeants, muselant toute prise de parole citoyenne. Et comme la subordination de certains médias locaux à la botte de ces mêmes dirigeants, qui de fait se sentent intouchables et méprisent allègrement toute opposition.
Article mis à jour le 18/04/2023
Une commission publique pas si transparente
Près d’1 Million d’€, c’est la somme qu’a touché la CPDP de la part des promoteurs (EDF, Innogy, Enbridge, et RTE) pour organiser les réunions publiques. Conflit d’intérêt ? Non, nous répondent-ils puisqu’une convention a été signée. Ouf !
Même si c’est la règle habituelle, pourquoi cette information du financement n’est-elle pas annoncée avant les réunions publiques ? D’autant que les représentants de la CNDP (Commission Nationale du Débat Public) n’ont eu cesse de mettre an avant leur transparence et leur indépendance.
Loin de moi l’idée de critiquer gratuitement la CNDP, qui nous a apporté des informations détaillées, et sérieuses mais quelque peu orientées. Non, la CNDP a le mérite d’exister mais ses règles de fonctionnement devraient être sérieusement revues. J’attends en tant que citoyen :
- Une transparence totale du financement avant les réunions publiques.
- Un temps de parole plus important pour les habitants du territoire.
- Un débat réel en donnant aux habitants la possibilité de présenter tout aussi longuement leurs critiques et solutions alternatives.
- Donner, à la fin du débat, le choix aux habitants par une consultation ou un référendum local de la poursuite d’un projet, au lieu de laisser ce seul choix entre les seules mains des promoteurs.
L’imposition d’un modèle mondialisé inadapté au territoire
Le modèle d’une économie mondialisée a montré ses limites lors de la crise du COVID, mettant en exergue les problèmes de souveraineté nationale. Et malgré cela, des projets supra nationaux d’EnR (Energie Renouvelables) continuent de s’imposer avec force (loi ASAP) sur de nombreux territoires. Tous ces projets de centrales industrielles d’EnR, allant de l’éolien au photovoltaïque, rencontrent de fortes oppositions sur les territoires, qui subissent ces choix d’implantation. Pourquoi l’opposition est-elle si forte si ces projets sont si géniaux et si vertueux ? Peut-être parce que ces modèles de production, imposés d’on ne sait où, ne sont pas choisis par les habitants eux-mêmes. Et parce qu’aussi, ils ne sont peut-être pas, tout simplement pas, adaptés au territoire.
Pourquoi raser des forêts qui sont la solution pour décarboner l’atmosphère, pour les remplacer par des centrales photovoltaïques ? Ne serait-il pas plus simple de poser ces panneaux sur les habitats qui ont besoin de cette électricité ? Les techniciens de RTE disent eux même que les circuits les plus efficaces, et les moins chers sont les plus courts. Le circuit producteur = consommateur est le meilleur. Alors pourquoi décentraliser à outrance la production d’énergie ? Pourquoi continuer à développer des centrales chères et couteuses, et qui perdent en efficacité, voir même déstabilisent le réseau ?
Alors que le collectif Vent Debout a montré toutes les incohérences et aberrations du projet du site industriel d’éoliennes en mer de Dunkerque, non, rien ne semble pouvoir arrêter le rouleau compresseur en ordre de marche. Un simple exemple : la DREAL exprime en 2011 que les zones Natura 2000 ne sont pas propices au développement de l’éolien en mer. Et bizarrement en 2020, cela ne leur pose plus de problèmes …
Une omerta politique
La plupart des courriers envoyés aux collectivités avec le collectif sont restés sans réponses. Seuls le préfet et la ville de Zuydcoote nous ont répondu, par écrit, à nos demandes de référendum, ou de consultation locale selon le code de l’environnement. A quoi sert ce code si on ne peut pas l’appliquer simplement en interpellant nos élus !? N’est-ce pas aux habitants de décider ce qui est bon pour leur territoire ou pas ? N’est-ce pas cela la démocratie ? En off, les élus ou proches des élus nous ont avoué qu’ils ne pouvaient pas s’opposer de façon franche au projet, voulu par le président de la Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD). De peur de ne pas se voir attribuer de subventions ou de services découlant directement de la CUD.
Chose plus préoccupante, car remettant en cause la liberté d’expression : j’ai posé des questions au Président de la CUD et maire de Dunkerque et il m’a bloqué de son profil. J’ai posé des questions à la représentante de la démocratie participative de Dunkerque qui m’a bloqué également (un comble !). La ville de Dunkerque a également supprimé des questions lors de vidéos en direct facebook. Et sur Twitter Patrice Vergriete m’a également bloqué alors que je ne l’avais même pas interpellé sur ce réseau. Et ce fut le cas pour de nombreuses personnes qui l’ont interpellé sur les questions du parc éolien. Qu’elles se revendiquent du collectif ou pas.
Certains médias locaux complaisants
L’expérience que j’ai eu au contact des médias locaux, m’a appris que les interviews que j’ai pu réaliser ne sont jamais retranscrites dans leur ensemble. J’ai dû apprendre à synthétiser mes propos avec des accroches percutantes pour qu’ils soient diffusés. Mais c’est logique puisque les médias sont là pour donner une information concise en s’appuyant sur les 2 parties. D’où la croissance des réseaux sociaux qui permettent à chaque partie d’exprimer pleinement leurs propos. D’autant plus si les parties n’ont pas les moyens d’occuper l’espace médiatique traditionnel. Les médias sociaux deviennent un nouvel outil d’expression démocratique.
Ce qui est plus gênant c’est quand un journal local comme « le phare dunkerquois » lors d’une première interview, assimile directement le collectif, apartisan, au Rassemblement National et ne diffuse aucun des arguments CONTRE le projet. Les propos sont ici volontairement déformés et donnent l’impression de tromper les lecteurs. D’autres articles montreront qu’ils sont souvent complaisants à l’égard du décideur qui les subventionne. Là aussi comme pour la CPDP, je pense qu’il y a un problème quand le payeur finance directement des médias censés retranscrire des informations objectives. Il est logique de s’efforcer de rester complaisant pour ne pas « perdre sa place ».
Malgré tout, les actions du collectif font leurs effets, comme les remarques des opposants politiques. Et de plus en plus de personnes qui découvrent, encore aujourd’hui les détails du projet, se mettent à soutenir le collectif. Cela a tout de même tendance à passablement énerver le président de la CUD, qui voit son hégémonie remise en question.